Diagnostiquer et comprendre l’autisme chez les tout-petits

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Charlotte, deux ans, ne réagit pas aux traditionnels « coucous », ne fait pas « au revoir » de la main, affiche peu de sourires, ne frappe pas des mains en guise d’excitation et se sent rarement interpellée par son prénom.

Ses parents, inquiets de ce comportement fort différent de celui de ses frères et sœurs ou encore des bambins de la garderie, soupçonnent dès lors leur petite de souffrir d’autisme. Mais qu’en est-il réellement? Karine Pépin, pédiatre, nous éclaire quant au diagnostic de l’autisme chez les enfants.

Docteur Pépin, qu’est-ce que l’autisme, ou sous une nouvelle appellation, le trouble du spectre de l’autisme (TSA)?

D’abord, il faut savoir qu’il s’agit d’un trouble du développement, faisant partie de cette grande catégorie des troubles envahissants du développement. Ainsi, l’autisme est caractérisé par des atteintes reliées à deux principaux secteurs du développement, soit lesinteractions sociales, par exemple une difficulté à entrer en contact avec autrui, peu de réciprocité dans les échanges et la communication, ainsi qu’une incompréhension à la fois du verbal et du non verbal. Également, notons la présence de comportements atypiques, ces derniers se voulant souvent stéréotypés et notamment caractérisés par des gestes répétitifs ou des intérêts très restreints.

Comment peut-on émettre un diagnostic d’autisme chez l’enfant?

Malheureusement, pour poser le diagnostic d’autisme, il n’y a ni prises de sang ni examens médicaux permettant de valider nos soupçons. Ainsi, le diagnostic est plutôt basé sur une évaluation globale du comportement. À cette fin, plusieurs échelles d’observation sont utilisées par les soignants. Parmi les références internationales figure l’ADOS (Autism Diagnosis Observation Schedule). Ce genre de grille nous permet donc d’observer certains comportements en plaçant l’enfant dans des situations spécifiques et en analysant ses réactions. Les éléments recherchés nous permettront donc de confirmer ou d’invalider nos premières hypothèses.

Par ailleurs, notons qu’au Québec ce diagnostic peut être émis par un médecin, par un pédiatre spécialisé en développement, mais également par un neuropsychologue ou encore un pédopsychiatre. Également, le diagnostic d’autisme chez l’enfant nécessite une collaboration entre soignants. Ainsi, les orthophonistes tout comme les ergothérapeutes peuvent se montrer d’une aide précieuse lorsque des atteintes respectivement au niveau du langage et des sens sont soulevées. Idéalement, le diagnostic de trouble du spectre de l’autisme devrait être posé par une équipe multidisciplinaire.

Existe-t-il divers stades de l’autisme chez l’enfant?

Pour l’autisme, on ne parlera pas de stades de la maladie, mais plutôt d’une atteinte variable en sévérité. Ainsi, mentionnons que certains enfants ont des atteintes plus sévères que d’autres et donc que l’autisme ne se manifestera pas forcément de la même manière d’un enfant à l’autre. Aujourd’hui, toutes ces formes de l’autisme, légères comme sévères, sont regroupées sous une même grande catégorie dans le DSM-5 et l’on parle plus communément de ce que l’on nomme le trouble du spectre de l’autisme (TSA).

Quelles sont les causes de l’autisme?

À ce jour, le mystère perdure et nous croyons que la réponse est complexe et que plusieurs facteurs sont en jeu. Parmi les causes, la génétique est une avenue explorée. À ce sujet, chez les jumeaux, nous savons aujourd’hui que si l’un des deux est atteint, l’autre présente plus de risques de recevoir le même diagnostic. Également, si un enfant est diagnostiqué autiste au sein d’une famille, nous observons que la fratrie court un plus grand risque d’être atteinte de cette maladie. L’autisme peut être diagnostiqué en même temps que d’autres maladies génétiques, ce qui alimente nos hypothèses et réflexions quant à une probable cause génétique. Enfin, si nous n’avons pu établir à ce jour de cause directe pour le diagnostic de cette maladie, il est pertinent de rappeler que les vaccins ne causent pas l’autisme. En effet, les études ont clairement démontré qu’aucune association ne peut être faite entre aucun vaccin et le développement de l’autisme sous l’une ou l’autre de ses formes.

Quels sont les thérapies ou traitements pouvant être proposés à l’enfant autiste?

S’il n’existe pas de traitements pour guérir l’autisme, il est cependant essentiel d’entreprendre des thérapies le plus tôt possible dans la vie de l’enfant pour espérer le meilleur pronostic. Ainsi, ces thérapies ont pour objectif de faire en sorte que l’enfant soit le plus fonctionnel possible. Elles visent plus explicitement à exploiter le potentiel de l’enfant et également à gérer les comportements plus difficiles. À titre d’exemple, s’il s’agit d’un enfant plutôt verbal, l’on concentrera notre énergie sur le développement du langage. Également, s’il s’agit d’un enfant éprouvant des difficultés sensorielles (le bruit, les sons, les textures), l’on pourra travailler à modifier ces perceptions. En ce qui concerne l’avenue pharmacologique, il arrive que certains médicaments soient prescrits dans une approche complémentaire aux thérapies, notamment pour diminuer l’agressivité ou encore pour modifier les comportements plus perturbateurs. Toutefois, l’objectif reste de traiter les symptômes et non la maladie en soi.

Certains articles relatent une hausse fulgurante des cas d’autisme dans notre société. Selon vous, est-ce réellement le cas?

De mon point de vue, plusieurs facteurs pourraient expliquer ce phénomène. D’abord, rappelons que toutes les formes d’autisme sont aujourd’hui regroupées sous une même catégorie, ce qui peut changer considérablement la donne en termes de statistiques. Également, mentionnons que l’autisme est une maladie beaucoup mieux connue et comprise qu’auparavant. Il y a 30 ans, les enfants autistes étaient probablement considérés comme différents sans qu’on leur accorde davantage d’attention. Aujourd’hui, il nous est possible de dépister cette maladie et de mettre un nom sur une réalité qui a probablement toujours existé.

Quel avenir pour un enfant autiste?

Il est difficile de prévoir l’avenir d’un enfant autiste. Tout dépendant du degré de sévérité de la maladie, l’enfant se verra très restreint dans ses capacités ou à l’opposé autonome et libre de se réaliser sur le plan personnel et professionnel. En résumé, la qualité de vie, les objectifs et les réalisations vont complètement différer selon la condition spécifique de l’enfant. Pour mettre toutes les chances de notre côté, rappelons cependant qu’un diagnostic posé en bas âge ainsi que des thérapies établies subséquemment constitueront la clé d’une vie meilleure pour l’enfant.

// Par Noémie Desbois Mackenzie
Bachelière en communication, et présentement à la maîtrise en communication de la santé