L’intensité d’exercice représente un des paramètres les plus manipulés en prescription d’activité physique. Voici comment s’en faire une alliée plutôt qu’une ennemie.
Souffrir pour la santé?
Tous ont déjà souffert d’une trop forte dose d’intensité et en ont assumé les conséquences du lendemain aussitôt le pied posé hors du lit. Dès lors, malgré la douleur qui harasse vos moindres mouvements, vous avez le sentiment du devoir accompli, celui d’être parvenu à une intensité soi-disant bienfaitrice pour votre santé.
Mais la régularité n’est pas chose faite, puisque cette fierté se dissipe souvent au même rythme que les courbatures et peut flancher devant une tâche semblable à répéter. Pourtant, les recommandations en activité physique sont claires : elles appellent la population à s’exercer en tenant compte d’un tas de paramètres objectifs tels que la fréquence cardiaque, la charge de travail ou encore la quantité de calories brûlées lors d’une séance. Et pour y parvenir, l’effort rigoureux est parfois de mise. Mais cette course folle aux numéros gagnants, pensez-vous, n’a-t-elle rien d’alléchant?
Se délivrer de la torture
Présentée ainsi, j’en conviens, la recette ne fait pas saliver. Il ne s’agit pas ici de condamner la haute intensité, bien au contraire. Cependant, il est faux de croire que les bénéfices pour la santé ne sont possibles qu’à travers l’exercice à haut régime. Alors soyons clairs : si votre objectif à long terme est d’être actif de façon régulière à des fins de plaisir et de santé, le choix de votre intensité d’exercice est un paramètre qu’il vous faut absolument considérer pour maintenir le cap, surtout si vous n’avez jamais été actif auparavant.
Une introspection active
Et j’ai mentionné le mot d’ordre : le choix, celui d’obéir à vos propres règles en matières d’intensité en donnant la parole à l’être humain qui se trouve en vous. Imaginez alors un instant que ces chiffres qui font l’objet de prescriptions de toutes sortes en activité physique mettent cette fois en valeur votre perception personnelle d’une séance d’exercice et l’appréciation que vous en tirez.
Imaginez également ces appareils qui calculent les mouvements de votre corps se tourner vers votre propre système de perception intérieure de l’activité et investiguer sur votre état d’être plutôt que sur le résultat de vos gestes. La découverte de ce qui s’y cache pourrait vous étonner et mener vos projets à bien. Car après tout, la motivation à enfiler les chaussures d’entraînement ne vous décollera pas du plancher à la lecture des statistiques de votre dernière séance. Elle puisera plutôt à même les sensations qui ont émergé de l’activité, qui n’ont d’ailleurs rien de chiffré.
L’échelle affective : un outil concret
Au plus grand bonheur des visuels de ce monde, il existe une échelle magique, dite affective, qui quantifie ce genre de perceptions plutôt abstraites. Cette échelle affective s’étend de -5 à +5 et est vouée à identifier votre niveau de bien-être pendant l’activité. Des chercheurs ont d’ailleurs démontré que de s’exercer pour se sentir «bien» (score de +3) menait à l’atteinte d’intensités suffisantes pour induire des bénéfices notables sur la santé.
C’est donc dire que vous pourriez vous y référer pour réguler votre intensité d’exercice sans même vous soucier du compteur et voir les bienfaits physiologiques apparaître au pas de course.
Ainsi, un bien-être correspondant à un score de +3 pourrait être atteint en combinant le type d’exercice qui vous plaît et en jouant avec les paramètres d’exercice qui vous enchantent le plus (environnement social et physique, musique, état d’esprit). Lors d’une séance subséquente, vous pourriez également viser une intensité plus ardue en abaissant le score affectif à +1 sans toutefois vous laisser dériver vers les valeurs négatives de l’échelle, qui entachent trop souvent la motivation.
En route vers l’autonomie
En incorporant l’échelle affective au sac d’entraînement, l’expérience objective tout autant que subjective serait légitimement rapportée et servirait ses causes respectives, à savoir l’atteinte de résultats physiques mesurables combinés au maintien d’un comportement actif dans lequel vous vous sentez réellement bien. Enfin, vous pourriez reprendre le contrôle de votre propre machine corporelle en vous libérant de tous ces appareils obsédés par la mesure.
En cas d’incertitude quant à la gestion de l’intensité d’exercice et de sa progression, le kinésiologue, qui demeure l’outil personnalisé de choix en activité physique, vous guidera sur la route de votre propre indépendance perceptuelle. En attendant, tentez de condamner le compteur et de rouler pour le plaisir lors de votre prochaine séance. Vous verrez, l’autonomie humaine commence là où les machines s’arrêtent.
Par Marianne Lacharité-Lemieux
Kinésiologue